Les membres de Méthatlantique ont travaillé ces dernières semaines sur une note d’information à propos des dispositifs énergie de secours.<br>Au regard des tendances entendues et observées sur le terrain, il nous apparait primordiale d’alerter autant que possible les exploitants d’unités de méthanisation et les porteurs de projets en finalisation, afin de faire un état des lieux de la règlementation en vigueur et des préconisations pour limiter les risques et les pratiques non adaptées, auprès des exploitants s’étant potentiellement équipés de ce type de dispositif.
Les coûts actuels de l’énergie flambent et génèrent des situations aussi imprévisibles que dangereuses. Si l’industrie est touchée de plein fouet par ces hausses qui peuvent être exponentielles, les unités de méthanisation n’échappent pas à cette situation, mettant à mal une filière déjà bien
affaiblie. Outre des hausses acceptables de tarifs qui peuvent être intégrées au Business Plan car la rentabilité est préservée, la situation est tout autre quand le contrat initial doit être renégocié et que le prix du MWh est multiplié par 5, 10, voire plus …
D’autre part, en termes de production électrique, de nombreuses centrales nucléaires du parc EDF sont toujours en maintenance, il est possible qu’EDF ne soit pas en capacité de couvrir tous les besoins en électricité sur notre territoire. Dans ce cadre, Enedis, le principal distributeur en électricité en
France, en lien avec RTE, envisage de procéder à des coupures de 2 h maximum en fonction de la consommation horaire sur les territoires. Il est donc possible que des unités de méthanisation soient impactées par des coupures et certains producteurs envisagent de mettre en place un groupe électrogène afin d’assurer la continuité de service de leur unité.
Comment en est-on arrivé là ?
Une accumulation de facteurs a abouti à l’explosion du prix de l’électricité qui touche l’Europe dans son ensemble et n’épargne pas la France. La reprise économique et industrielle, la demande – liée à la sortie de la crise économique due au Covid-19 – tire les prix à la hausse depuis la fin de 2021.
Les tensions sur les marchés mondiaux ont été amplifiées par la guerre en Ukraine à partir du début de l’année 2022. Bref, le prix de l’énergie flambe…
Rustine ou roue de secours ?
Cette situation inquiète l’ensemble des consommateurs quels qu’ils soient (particuliers, industriels et collectivités) et tout est mis en œuvre pour trouver des alternatives ”sauve-qui-peut ” acceptables ponctuellement mais demeurent très fragiles voire non pérennes dans le temps.
Point de vigilance : réglementation énergie de secours pour les sites de méthanisation
L’utilisation d’un groupe de secours (type groupe électrogène au gasoil) est autorisée sur un site de méthanisation pour assurer les besoins en énergie lors de l’absence d’énergie sur le réseau indépendant de votre volonté (coupure réseau, défaut de production…)
Complément réglementaire apporté par le service juridique Club Biogaz de l’ATEE :
L’utilisation d’un moteur fonctionnant au biogaz pour les besoins en autoconsommation d’électricité d’une installation de biométhane injecté est possible, sur toute l’installation (information confirmée par le ministère).
En revanche, sur une unité de cogénération biogaz, l’interprétation des textes n’est pas claire, et il semblerait que l’autoconsommation ne soit possible que sur les machines électrogènes.
- Les contrats d’achat (BG16 par exemple) prévoient que les auxiliaires sont les “organes, dispositifs ou équipements électriques ou mécaniques dédiés et intégrés à l’installation sans lesquels celle-ci ne pourrait pas fonctionner.” Or, l’installation est définie dans l’arrêté tarifaire comme : “ensemble des machines électrogènes susceptibles de fonctionner simultanément en utilisant à titre principal le biogaz issu d’une même unité amont, à laquelle l’installation est reliée physiquement”.
Est-ce que les équipements de l’unité amont (digesteur et prétraitement) peuvent être considérés comme “dédiés à l’installation” car nécessaires à son fonctionnement ?
Cette question a été envoyée à la DGEC et est en attente de réponse.
Cela permettrait aux unités en exploitation d’auto consommer leur électricité pour les besoins de la méthanisation plutôt que de soutirer de l’électricité du réseau.
- Pour le biométhane injecté, arrêté du 13 décembre 2021 : les besoins en énergie liés au chauffage du digesteur pour une installation de méthanisation ainsi qu’à l’épuration du biogaz et à l’oxydation des évents pour toute installation ne sont pas satisfaits par une énergie fossile, sauf pendant la période de démarrage ou de redémarrage de l’installation. Donc un groupe électrogène au gasoil ne peut être utilisé pour les consommations électriques de l’épuration et du traitement des évents que pendant la montée en charge de l’installation ou un redémarrage.
- Pour la cogénération biogaz, arrêté du 13 décembre 2016 “BG16” : Chaque année, l’installation peut consommer une fraction d’énergie non renouvelable pour des nécessités techniques lors de phases de démarrage ou pour assurer une certaine stabilité à la combustion. Cette fraction d’énergie ne peut être supérieure à l’énergie autoconsommée par l’installation de production pour les besoins de son fonctionnement (fonctionnement des moteurs, aspiration du biogaz, aéroréfrigérants, etc.) et ne peut en aucun cas dépasser 10 %. Donc un groupe électrogène au gasoil peut être utilisé pendant les phases de démarrage ou pour assurer une stabilité à la combustion, tant que l’électricité issue du groupe électrogène reste inférieure à l’énergie autoconsommée et inférieure à 10 % de la consommation électrique de l’installation.
Conseils et préconisations en cas de mise en place d’un groupe énergie de secours :
1° Hypothèse :
L’installation d’une source d’énergie électrique secours intégrée au projet initial ne doit pas poser de problème technique particulier car l’installateur professionnel se doit de connaître normes, règles et obligations (découplage, régime de neutre, mise à la terre, protections…) et d’autre part, cette installation a fait obligatoirement l’objet d’un contrôle réglementaire par un organisme agréé avant la mise en service des installations et équipements électriques de l’unité de méthanisation.
2 ° Hypothèse :
L’acquisition et/ou montage d’un groupe de secours de production électrique mise en place dans l’urgence peut engendrer des oublis et des risques pour les personnes et les biens. C’est pour cela que nous conseillons de prévoir une étude pour la mise en place de ce type d’équipement avec une analyse des besoins et d’intégration dans votre installation électrique existante. D’autre part, avant la mise en route de ces installations et équipements de secours, il sera nécessaire de faire un contrôle réglementaire par un bureau de contrôle agréé pour respecter les normes et réglementation en vigueur.
Lors de l’étude il faudra à minima traiter les points suivants :
- Le couplage / découplage au réseau
- L’absence d’énergie sur le réseau autorise la production autonome
- L’énergie est rétablie, arrêt de production autonome et re-couplage au réseau (GE-GO)
- Le régime de neutre de l’installation existante et adapté aux circuits électriques du groupe électrogène
- La compatibilité du groupe électrogène au régime électrique du site (dans le cas d’un groupe électrogène issu de l’étranger, avec des normes différentes)
- La régulation de la tension
- Le respect de la tension exigée par le constructeur de l’unité
- La vérification des exigences et des tolérances admissibles
- La mise à la terre
- Le respect de la conformité
- La liaison réseau, mesure et continuité
- La protection des matériels sensibles (supervision, automatisme, carte électronique, etc.)
- …
NB : Nous souhaiterions que les précisions réglementaires attendues donnent lieu à un webinaire dédié qui suivra cette note d’information. Merci de manifester par le formulaire contact du site, attentes et intérêts à cette proposition.
Le GT Méthatlantique
A propos de Méthatlantique
Methatlantique est une association de professionnels ligériens du méthane renouvelable et de la mobilité bioGNV, soutenue par la Région et l’ADEME Pays de la Loire, qui œuvre depuis 2017 à accompagner le développement local d’une filière durable. L’association regroupe plus de 50 adhérents implantés en Région Pays de la Loire, et vise à fédérer, promouvoir, professionnaliser et représenter les acteurs régionaux du méthane renouvelable de la production aux usages. Avec une gouvernance associative et un plan d’actions complet, entre le think-tank et le do-tank, Méthatlantique est aussi un centre de ressources, une boîte à outils pour des porteurs de projets et les parties prenantes régionales partenaires.